4.
Or, il y a une grande différence entre notre âme et les paroles par lesquelles nous tâchons de la faire connaître. En effet, nous n'engendrons pas les paroles que nous faisons entendre, mais nous les produisons, et, pour les produire, le corps nous sert de matière. Or il y aune grande différence entre l'âme et le corps. Mais Dieu en engendrant son Verbe a engendré ce qu'il est lui-même ; il ne l'a point tiré du néant ni de quelque matière déjà faite et créée; mais il a produit de lui-même ce qu'il est lui-même. Et c'est à cela aussi que tendent nos efforts quand nous parlons, si nous examinons elle près le désir de notre volonté ; non toutefois quand nous mentons, mais quand nous disons la vérité A quoi travaillons-nous en effet sinon à donner notre âme à connaître et à voir à l’âme de l'auditeur, autant que faire se peut; en sorte que, tout en restant en nous, sans sortir de nous, nous produisons ,des signes qui nous révèlent à un autre, et que notre âme produit comme une autre âme par laquelle elle se manifeste ? C'est ce que nous nous efforçons de faire par les paroles, par l'accent de la voix, par la physionomie, par le geste; autant de moyens que nous employons dans le désir de montrer ce qui est au dedans de nous: chose, au fait, impossible, puisque l'âme de celui qui parle ne peut pas être connue entièrement : ce qui laisse place aux mensonges. Mais Dieu le Père, qui a voulu et pu se révéler parfaitement aux âmes qui doivent le connaître, a engendré, pour se révéler, ce qu'il est lui-même: et on appelle Celui qu'il engendre sa Vertu et sa Sagesse, parce que c'est par lui qu'il a fait et réglé toutes choses, et voilà pourquoi on dit : « Il atteint d'une extrémité à l'autre avec force, et dispose toutes choses avec douceur 1. »
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Sag. VIII, 1. ↩
