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Works Jerome (347-420) Consolations adressées à un malade

3.

Une malheureuse félicité les conduit à la mort, comme un vaisseau que la tempête brise contre les rochers. Il faut que ceux qui jouissent d'une prospérité incertaine et qui goûtent les plaisirs d'une vie mal assurée tombent sans pouvoir être relevés, ainsi que l'on voit tomber ceux qui, marchant sans défiance, glissent sur un marbre uni ou sur des pavés qui s'enfoncent sous leurs pas. De là vient que Salomon a dit : « La chute des pécheurs arrive inopinément comme celle de celui qui glisse sur un pavé.» Ceux-là sans doute ne méritent pas d'être mis à l'épreuve par quelques afflictions: on leur prépare une maladie qui durera toujours. Ils ne sont point dignes d'être frappés comme les justes de la main du Sauveur, et de passer ensuite avec lui des châtiments à la gloire. C'est à eux que s'adressent ces paroles de David : « Ils ne sont pas dans la pensée des hommes, ils ne seront pas affligés comme les hommes; de là vient qu'ils sont remplis d'orgueil. »Vous voyez donc que l'on méprise ceux qui sont indignes d'être châtiés de la main du médecin, et que l'on corrige amicalement ceux qui méritent d'être châtiés. Dieu, qui est le père et le médecin de tous les hommes, frappe de telle sorte ses enfants et ses malades qu'il guérit les uns et corrige les autres sans en tuer aucun. Heureux celui qui en est battu! il porte les marques de son affection; heureux celui que des coups de la main de Dieu guérissent, châtient et corrigent! qu'il s'écrie avec le prophète-roi : « Heureux celui que vous reprenez, Seigneur, et à qui vous enseignez votre loi! »

Ainsi, puisqu'il plaît au Sauveur que nous soyons sujets à diverses afflictions et que nous menions une vie qui veut être épurée par les misères , supportons comme une épreuve de notre vertu des afflictions que l'on nous a prédites depuis longtemps ; souffrons avec courage tant de traverses différentes auxquelles notre naissance nous a exposés. Il ne faut pas s'étonner que les hommes soient accablés en ce monde de tant de maux divers, puisqu'il n'y a personne qui naisse en riant, et que ce n'est qu'avec des larmes que l'on commence à voir le jour. Quand notre mère nous a enfantés nous avons appris en pleurant ce que c'est que le monde, et nos premières souffrances ont été la cause de nos premières larmes. Aussi Salomon assure qu'en naissant il a reçu une vie semblable à celle des autres, qu'il a marché sur une terre pareille à la leur, qu'il a proféré ses premiers bégaiements en pleurant, qu'il a été nourri parmi les soins et les embarras; car la naissance des rois n'est point différente de celle des autres : tous naissent et meurent également. Il faut que ceux qui sont venus passent, puisque notre vie n'est qu'un voyage. « On passe dans la vie, »dit Salomon, «et l'on en sort de la même manière. Que sert-il donc de chercher la prospérité ou la joie? L'on y apprend d'abord à pleurer. Dès mon enfance je n'ai rien vu dans le monde que des sujets de larmes. » Nous avons pleuré en naissant et nous pleurerons quand nous mourrons; vie fâcheuse et de peu de durée dont on voit la fin dès le commencement, car aussitôt né , aussitôt mort. J'en prends à témoin ceux qui sont morts qui croyaient ne pas mourir. Puisque donc nous sommes nés pour mourir, surmontons par notre patience, comme des voyageurs, ce qui nous arrive en chemin. On triomphe des maux que l'on endure avec résolution; on sent plus vivement le mal que l'on souffre sans courage. Le bien même nous incommode si nous n'en jouissons pas avec fermeté. L'on a sans doute besoin du secours de sa vertu, et de considérer la récompense qui est promise dans le ciel, lorsque l'on vit de telle manière que l'on est obligé de désirer la mort, comme ceux qui sont sur la mer désirent d'arriver au port. En effet, parmi les inquiétudes du siècle, parmi les douleurs que causent les maladies, ne désire-t-on pas plutôt mourir que de mener longtemps une vie languissante? « La mort, » dit Salomon, « est plus avantageuse qu'une vie pleine d'amertume, et un repos assuré qu'une langueur continuelle.» «Il vous est plus utile,» dit-il ailleurs, «de mourir que de vivre, car la mort met en repos tous les hommes. » Il est certain que l'on désire avec passion de voir la fin des traverses dont nous sommes accablés; cependant, comme il n'a pas dépendu de nous de naître, il n'est pas en notre pouvoir de mourir quand il nous plaît ; car s'il était en notre pouvoir de mourir quand il nous plaît, il serait aussi en notre pouvoir de ne pas mourir. De là vient qu'au milieu des afflictions de cette vie nous nous entretenons de la mort et du repos que nous y rencontrons. En effet, c'est une consolation dans la tristesse de parler des plaisirs. Ceux qui voyagent sur la mer en usent de la sorte ; et parmi les périls qu'ils essuient dans les tempêtes et entre les rochers, ils trouvent du soulagement à s'entretenir de la sûreté dont ils jouiront au port ; car, quoique pour cela l'on n'y arrive pas plus tôt, il est pourtant naturel de désirer une condition plus avantageuse. Mais puisqu'il ne dépend pas de nous de jouir de cette condition plus avantageuse, et que nous sommes dans la nécessité de l'attendre, combattons cependant généreusement contre les obstacles. Or, c'est combattre généreusement que ne point succomber, et que supporter les maux qui nous conduiront à la jouissance des biens due nous trouverons dans la mort, dont la douceur ne sera point troublée par des maladies et. par la crainte d'une nouvelle mort. L'on ne triomphe pas, l'on n'arrive pas à une gloire éternelle sans avoir senti les atteintes de l'affliction et de la misère; l'on ne termine son voyage et l'on ne vient au port qu'à travers des tempêtes : celui-là seulement peut passer pour avoir triomphé qui s'est ouvert le chemin à la victoire par sa vertu, qui a écrasé tout ce qui donne de la crainte aux autres, et mis à la chaîne ce qui n'avait pas encore été vaincu.

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