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Je n'oserais jamais, même sous forme de badinage, attaquer les académiciens; l'autorité de si grands hommes me toucherait déjà beaucoup, si de plus je ne savais que leur pensée n'a pas été celle que le vulgaire leur a prêtée. Autant que je l'ai pu, je les ai imités plutôt que combattus, ce qui passerait mes forces.
Il me paraît qu'il était alors convenable que si quelque chose de pur coulait de la source platonicienne, on le mît à la portée d'un petit nombre d'hommes seulement, en le faisant passer dans un lit étroit tout voilé d'ombres et sous des buissons épineux, au lieu de le conduire à découvert et de l'exposer à être troublé et souillé sous les pieds des bêtes qui s'y seraient précipitées. Quoi de plus bestial en effet que l'opinion de ceux qui croient que l'âme .que un corps? Contre des hommes de cette sorte, il était raisonnable et utile de recourir à l'art et à la méthode du vrai Dieu [^1]. Mais dans ce siècle où nous ne voyons plus de philosophes, si ce n'est peut-être ceux qui en portent la robe, et que je ne trouve pas dignes d'un nom si vénérable, il me semble bon de ramener à l'espérance de découvrir la vérité ceux que les académiciens, par le génie de leur langage, détourneraient de la connaissance des choses. Il ne faudrait pas que des précautions prises dans un temps pour le déracinement de profondes erreurs, servissent à empêcher qu'on ne répandît la science.
